Page:Ossian - Œuvres complètes, 1842, trad. Lacaussade.djvu/187

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

farouches ? Ils sont comme deux nuages, et leurs épées comme des éclairs au-dessus d’eux. Les collines sont émues à l’enlour et les rochers tremblent avec toute leur mousse. Qui est-ce autre que le fils de l’Ocean et le chef d’Érin, monté sur un char ! Les yeux de leurs nombreux guerriers sont inquiets en les apercevant confusément sur la bruyère ; mais la nuit voile les chefs dans ses nuages et termine le terrible combat.

C’était sur les pentes touffues du Cromla que Dorglas avait placé le chevreuil, produit matinal de la chasse, avant que les héros eussent quitté la colline. Cent jeunes guerriers amassent la bruyère, dix héros éveillent la flamme, trois cents choisissent des pierres polies, et la fumée du festin se répand au loin.

Cuthullin, chef de l’armée d’Érin, a recueilli sa grande âme ; il s’appuie sur sa lance rayonnante et parle au fils de l’harmonie, à Carril des temps passés, le fils aux cheveux gris de Kinfena.

« Le festin est-il préparé pour moi seul, et le roi de Lochlin restera-t-il sur le rivage d’Érin, loin des cerfs de ses collines et des salles bruyantes de ses fêtes ? Lève-toi, Carril des temps passés, porte mes paroles à Swaran. Dis à celui, venu sur les vagues mugissantes, que Cuthullin donne sa fête, qu’il y vienne écouter le bruit de mes forêts au milieu des nuages de la nuit ; car froids et glacés se précipitent les vents furieux sur l’écume de ses mers. Qu’il vienne ici louer la harpe vibrante et entendre les chants des héros ! »

Le vieux Carril part, et de sa voix la plus douce il invite le roi des noirs boucliers. « Quitte les fourrures de la chasse, lève-toi Swaran, roi des forêts ! Cuthullin donne la joie des coupes ; partage le festin du chef aux yeux bleus d’Érin ! » Il répondit comme la voix sourde du Cromla avant la tempête. « Quand