Page:Ossian - Œuvres complètes, 1842, trad. Lacaussade.djvu/230

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ton épée et choisis ton ennemi : nombreux sont mes héros ! »

« Le roi refuse donc le combat ? dit Orla. Fingal est, de toute sa race, le seul rival digne d’Orla ! mais, roi de Morven, si je succombe, puisqu’un jour le guerrier doit mourir, élève ma tombe au milieu de cette plaine ; qu’elle soit la plus haute sur Lena ! À travers la vague sombre et bleue, envoie l’épée d’Orla à l’épouse de son amour, afin qu’elle puisse, avec des larmes, la montrer à son fils et enflammer son âme aux combats. » — « Guerrier aux tristes discours, lui dit Fingal, pourquoi réveilles-tu mes pleurs ? Les guerriers doivent mourir un jour et leurs enfants verront dans leurs demeures leurs armes inutiles : mais, Orla, ta tombe sera élevée et ta blanche épouse pleurera sur ton épée. »

Ils combattirent sur la bruyère de Lena : mais le bras d’Orla était faible. L’épée de Fingal descend et fend en deux son bouclier qui tombe et brille sur la terre, comme la lune sur les ondes émues des torrents. « Roi de Morven, dit le héros, lève ton épée et perce-moi le sein. Faible et blessé dans le combat, je fus abandonné ici par mes amis. Ma triste histoire parviendra à mon amour sur les rives du Lota[1], quand elle sera seule dans les bois et que la brise frémira dans les feuilles. »

Non, répondit le roi de Morven, non, Orla, jamais je ne te blesserai. Sur les rives du Lota que ton épouse te revoie, échappé des mains de la guerre. Que ton père en cheveux blancs, qui peut-être est aveugle par l’âge, entende le son de ta voix et se réjouisse dans sa demeure ! Le héros se lèvera plein de joie et de ses mains il cherchera son fils. » — « Mais jamais il ne le trouvera, Fingal, répond le jeune

  1. Lota, ancien nom d’une des grandes rivières du nord de l’Écosse.