Page:Ossian - Œuvres complètes, 1842, trad. Lacaussade.djvu/235

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au-dessus d’eux trois. Ton fils, roi de Morven, reposera ici avec des héros ! »

« Et mon fils, dit Fingal, reposera près d’eux : la voix de leur gloire résonne à mes oreilles. Fillan et Fergus, portez ici Orla, le pâle et jeune guerrier des rives du Lota ; Ryno ne sera point couché dans la terre près d’un rival indigne, lorsque Orla reposera à ses côtés. Pleurez, filles de Morven ! et vous, vierges du Lota, pleurez ! Comme un arbre ils croissaient sur les collines ; ils sont tombés comme le chêne du désert, lorsque, couché au travers d’un torrent, il se flétrit au vent. Oscar, chef de la jeunesse, tu vois comment ils ont péri ; sois, comme eux, renommé sur la terre ; sois, comme eux, le sujet du chant des bardes ! Leur aspect était terrible dans le combat ; mais calme était Ryno dans les jours de la paix. Il était comme l’arc de la pluie que, de loin, l’on aperçoit sur le torrent, quand le soleil se couche sur Mora, et que le silence habite la colline des chevreuils. Repose, ô le plus jeune de mesfds ! repose, ô Ryno, sur la plaine de Lena ! Nous aussi, bientôt nous ne serons plus : un jour doivent tomber les guerriers ! »

Telle était ta douleur, roi des épées, lorsque Ryno reposait sur la terre. Quelle doit être la douleur d’Ossian, puisque toi-même tu t’es en allé ! De loin je n’entends plus ta voix sur Cona ; mes yeux ne t’aperçoivent plus. Souvent, triste et délaissé, je m’assieds sur ta tombe et la touche de mes mains. Quand je crois entendre ta voix, ce n’est qu’une brise qui passe ! Depuis longtemps Fingal s’est endormi, Fingal l’arbitre de la guerre !

Alors Gaul et Ossian s’assirent avec Swaran sur les douces et vertes rives du Lubar. Je touchai la harpe pour distraire le roi ; mais sombre était son front. Il portait vers Lena ses yeux rouges de larmes : le héros pleurait son année. Je levai les yeux