Page:Ossian - Œuvres complètes, 1842, trad. Lacaussade.djvu/287

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La rage s’alluma dans leurs cœurs. Ils roulaient en secret des yeux enflammés et des soupirs s’échappaient de leur sein. On les voyait s’entretenir ensemble et jeter leurs lances sur la terre. C’étaient deux noirs nuages au milieu de notre joie ; semblables à deux colonnes de brouillard sur la mer qui s’apaise : elles brillent au soleil, mais les mariniers redoutent une tempête.

« Levez mes blanches voiles, dit Ma-ronnan, levez-les aux vents de l’Occident. Élançons-nous, ô Aldo, à travers l’écume de la vague du nord. Nous avons été oubliés à la fête ; et le sang a cependant rougi nos armes ! Quittons les collines de Fingal, servons le roi de Sora ! Son attitude est fière et les noires batailles environnent sa lance. Illustrons-nous, ô Aldo, dans les guerres des autres contrées ! »

Ils prirent leurs épées et leurs boucliers aux liens de cuir ; ils volèrent à la baie retentissante de Lumar. Ils arrivèrent devant le chef altier de Sora, le roi des bondissants coursiers. Erragon revenait de la chasse. Sa lance était rouge de sang. Il penchait vers le sol son visage sombre et sifflait en marchant. Il invita les étrangers à ses fêtes : ils combattirent et triomphèrent dans ses guerres.

Aldo revenait avec gloire vers les hautes murailles de Sora. Du haut de ses tours, regardait sur la plaine l’épouse d’Erragon, Lorma aux yeux humides. Ses cheveux dorés volent sur le vent de la mer ; son sein blanc se soulève comme la neige sur la bruyère, quand les douces brises soufflent et mollement la meuvent dans la lumière. Elle vit le jeune Aldo, semblable au rayon couchant du soleil de Sora. Son doux cœur soupire ; des larmes remplissent ses yeux. Sa main blanche soutenait sa tête. Trois jours elle s’assit dans le palais et couvrit sa douleur du voile de la joie. Le quatrième, avec le héros, elle s’enfuit sur la mer agitée. Ils vinrent à Cona dont les tours