Page:Ossian - Œuvres complètes, 1842, trad. Lacaussade.djvu/291

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nante armure de Trenmor et le noir bouclier de ses pères. Les ténèbres remplirent les salles de Selma quand il étendit la main vers sa lance : les ombres de mille morts étaient autour de nous et prévoyaient la chute des guerriers. Une joie terrible se lève sur la face des vieillards. Ils s’élancent à la rencontre de l’ennemi. Leur pensée s’arrête sur les hauts faits des années passées et sur la gloire qui s’élève de la tombe !

Au même instant, près de l’antique tombeau de Trathal paraissent les chiens de la chasse. Fingal comprit que ses jeunes héros les suivaient et s’arrêta au milieu de sa course. Oscar parut le premier ; ensuite le fils de Morni et le descendant de Némi. Fercuth montra sa forme menaçante. Dermid livrait aux vents sa noire chevelure. Ossian vint le dernier. Je murmurais les airs des autres temps. Mes pas s’appuyaient sur ma lance pour francbir les torrents et mes pensées étaient pleines du souvenir des grands hommes. Fingal frappe les bosses de son bouclier et donne le funeste signal de la guerre. Mille épées, tirées en même temps, étincellent sur l’ondoyante bruyère. Trois bardes en cheveux blancs élèvent leur voix mélodieuse et lugubre. À pas retentissants et en une file profonde et ténébreuse nous fondons sur la plaine, semblables à l’averse des orages, quand elle tombe sur une étroite vallée.

Le roi de Morven s’assied sur sa colline et dans les vents se déploie le soli-flamme[1] des batailles. Les amis de son jeune âge, sous les ondoyantes boucles de leur vieillesse, se tenaient auprès de lui. La joie monta dans les yeux du béros, quand il vit ses enfants dans la bataille ; quand il les vit, au milieu des éclairs des épées, se souvenir des actions de

  1. Le soli-flamme ou étendart de Morven. « The sun-beam of battle. »