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Tout ce qui existe vraiment existe en tant que synthèse plus ou moins imparfaite, association plus ou moins discordante. Nous ne connaissons rien de la société à l’atome qui puisse s’affirmer absolument simple. Et ce qui fait l’unité, et par conséquent l’existence de l’atome, de l’individu biologique, de l’âme de la société, c’est l’association[1].

Association implique action réciproque d’un corps sur un autre. Son fait capital c’est qu’elle constitue non seulement une addition à la puissance vitale mais une multiplication de cette puissance. Un homme isolé soulève 30 kilos ; cent individus soulèvent non 3000 mais 300,000 kilos et plus. Trente ouvriers se partageant la besogne peuvent fabriquer par jour 15,000 cartes à jouer, soit 500 par tête ; travaillant séparément chaque ouvrier pourrait fournir au plus 2 cartes par jour. L’association donne donc dans ce cas une puissance de 250 fois supérieure à la simple addition de forces. (Exemples cités par J.-B. Say.) On peut s’imaginer les immenses forces latentes que peut mettre en œuvre l’association érigée au degré international.

L’association s’effectue par un échange de services, autrement dit par une circulation vitale. L’association est un moyen ; la fin est l’intensité vitale de l’individu ; car, il ne faudrait jamais le perdre de vue, l’association comme telle n’est qu’une entité métaphysique sans réalité concrète. Le but vers lequel tendent tous les organismes c’est le maximum d’intensité vitale, en d’autres termes le maximum de conscience. Depuis l’apparition des animaux les plus inférieurs jusqu’à la formation des sociétés humaines les plus parfaites, la direction vers ce but s’accuse de plus en plus. Le progrès se marque par la transformation de l’inconscient vers le conscient. Tout ce qui favorise le mouvement dans cette direction s’appelle le bien ; tout ce qui le contrarie est le mal.


232.2. HISTOIRE DES DOCTRINES CONCERNANT LA SOCIÉTÉ.. — Les Anciens, après eux les Chrétiens, envisagent la Société comme d’institution divine. Lucrèce cependant esquisse déjà une théorie d’après laquelle la société serait d’invention humaine. Hobbes fait de la société un produit de la raison par opposition à l’état de nature qui est l’état de guerre : par un contrat social d’universel renoncement à tout droit est constitué, en vue de la paix, un monstre,

    mêmes espèces. L’intérêt est à la base des unes et des autres. Dans les sociétés animales les plus parfaites, comme celle des abeilles, l’adaptation aux diverses fonctions sociales est si étroite qu’il en est résulté un polymorphisme, plus ou moins varié, c’est-à-dire qu’une même espèce, d’après les fonctions des individus, offre des formes différentes (reines, faux-bourdons, ouvrières, chez les abeilles). On constate chez les fourmis et les termites un polymorphisme du même ordre. — A. Espinas, Les sociétés animales (1878 et 1883). — Romanès, L’intelligence des animaux, (1899). — Le Dantec, Traité de biologie (1903).

  1. Jaques Novicow, L’association humaine, Solidarité sociale, (Congrès de l’Institut international de sociologie.) — F. Faulhan, Qu’est-ce que l’association ?