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DISTRIBUTION DU LIVRE

4. — Prêt des ouvrages entre bibliothèques.

1° Le prêt est à distinguer selon qu’il s’agit de manuscrits, d’imprimés rares ou uniques, d’anciens livres, de gravures ou photographies, cartes ou autres espèces de documents. 2° Comme raison d’être du prêt, il faut considérer : a) que le travail scientifique ne peut progresser qu’avec la consultation possible de tous les ouvrages renseignés par la bibliographie et qui se trouvent dispersés dans les bibliothèques en des lieux où ne se trouvent pas toujours les travailleurs les plus qualifiés pour les utiliser ; b) qu’il y a intérêt pour un pays à voir mettre en valeur par l’usage ses propres richesses bibliographiques ; c) la notion d’une communauté intellectuelle universelle et d’une collectivisation des instruments et des produits du travail intellectuel gagne chaque jour du terrain. 3° Contre le prêt s’élève : a) tous les arguments en faveur des bibliothèques dites de présence qui donnent aux travailleurs l’assurance qu’ils pourront y trouver les ouvrages catalogués ; b) tous les arguments contre les risques auxquels sont exposés les ouvrages qui sont transportés hors de la bibliothèque. 4° Les substituts du prêt sont : a) la réédition des ouvrages rares ; b) la Photocopie ; c) les voyages bibliographiques, comme il y a des voyages d’études en tous domaines. 5° Une organisation internationale du prêt entre bibliothèques demeure une institution désirable. C’est par une convention internationale qu’on peut la concevoir, convention ouverte à tous les pays et dont les diverses parties seraient facultativement accessibles. L’organisation doit être mise en rapport avec les autres organisations du livre dans le cadre de l’organisation mondiale de la documentation. Elle doit être reliée à l’organisation nationale et à l’organisation locale de la documentation.

Le prêt international entre bibliothèques a fait l’objet de nombreux travaux.[1]

5. — Échanges internationaux.

Le service international des échanges a été établi par la Convention de 1884.

a) L’idée première des échanges internationaux est due à la puissante organisation américaine, la Smithsonian Institution. Les Américains ayant désiré internationaliser l’idée, reçurent un accueil favorable en Belgique et Patronage très actif du Comte de Flandre. Malheureusement, en ces temps lointains où l’internationalisme commençait à peine, on s’abstint de donner à la Convention un organe permanent. Il s’en suivit qu’aucun perfectionnement ne lui fut apporté au cours des années. Des initiatives en vue de la réunion d’une Conférence Internationale de revision et d’extension furent prises avant la guerre en Belgique même. Toute la question fut abandonnée depuis à la Société des Nations, Commission de Coopération Intellectuelle.

Elle repose sur le principe que, comme échange d’expériences scientifiques d’informations, de matériaux, le livre est un des plus forts stimulants pour le développement de la pensée scientifique.[2]

L’importance des échanges est montrée, bien que sur un point, par le Catalogue des dissertations et écrits académiques provenant des échanges, publié par la Bibliothèque Nationale de Paris.

b) Il serait désirable notamment : 1° que l’échange fût organisé nationalement aussi bien qu’internationalement ; 2° que les expéditions, de ou par les échanges, fussent plus fréquentes (colis postaux, au lieu de colis des chemins de fer) ; 3° que le principe à la base des accords de 1884 devienne une réalité, à savoir : la totalité de la production intellectuelle de chaque pays échangée contre la totalité de tous les autres pays. Le Service international des Échanges étant particulièrement favorable à l’échange des périodiques, il y a là le moyen d’établir des collections internationales de revues.

c) Les échanges internationaux prennent trois formes : 1° échanges avec équivalence immédiate (sorte de Bourse aux Livres) ; 2° échanges sans équivalence ni prestation immédiates : sorte de compte courant dont le crédit et le débit ne se soldent qu’au cours du temps ; 3° distribution gratuite de publications par l’intermédiaire du Système des Échanges internationaux et sans que la réciprocité soit une condition.

d) La convention internationale de 1884 porte sur deux objets : 1° les publications des sociétés scientifiques ; 2° les documents officiels, parlementaires et administratifs, ainsi que les ouvrages exécutés par ordre et aux frais des gouvernements.

e) En Allemagne, un décret du 5 janvier 1926 a créé le « Reichstarstelle im Ministerium des Innern » (Office d’échange au Ministère de l’Intérieur). Incombe à cet office le soin d’organiser les échanges officiels avec l’étranger, de susciter les relations (également avec les sociétés savantes), de réaliser l’envoi central à l’étranger et de répartir les envois de l’extérieur selon la méthode de la Smithsonian Institution. L’Office allemand a été aidé par la Emergency Society of German and Austrian Science and Art, créée par le professeur Boas de la Columbia University de New-York.

La Smithsonian Institution a donné la plus grande extension à ses propres services d’échange. Ses collec-

  1. J. Emler. — Prêt international entre bibliothèques. Fédération inter. des Associations de Bibliothèques. Publ. vol 4. La Haye 1932, p. 150. — Gustav Abb. Wege zum internationale Leihverkehr. Zentralblatt für Bibliothekswesen. 1933. p. 161.
  2. Institut International de Coopération Intellectuelle. Guide des services nationaux de renseignements, de prêt et des échanges internationaux.