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LE LIVRE ET LE DOCUMENT

et le droit commercial ; elle sert d’intermédiaire entre l’administration et l’économie.

La société anonyme peut être la forme juridique donnée à l’économie mixte, le pouvoir public lui faisant un apport en nature ou en argent en représentation duquel il reçoit des actions qui lui confèrent voix délibératives et même des sièges dans le Conseil d’administration ; sièges d’ailleurs pouvant lui être réservés en dehors de toute élection, en raison de son caractère de puissance publique et des intérêts généraux qu’il représente.[1]

c) L’administration comparée révèle l’existence de nouvelles structures et de nouvelles activités administratives. Retenons notre attention sur quelques exemples. Dans l’organisation municipale moderne de Vienne fonctionne un Office de Contrôle (Kontrollambt). Il a trois attributions, théoriquement distinctes, mais pratiquement interdépendantes : ce sont : le contrôle des gestions ; le contrôle des comptes ; le contrôle de l’organisation.

Quant à la gestion, l’Office a pour devoir suprême de tenir la municipalité continuellement et entièrement au courant de ses constatations et de découvrir toutes les défectuosités économiques. Ses fonctionnaires examinent journellement sur place les opérations économiques. Ils s’assurent que les données des comptes et des dossiers sont conformes à la réalité. Quant au contrôle d’organisation, il est la condition indispensable pour que le contrôle des gestions et celui des comptes puissent s’exercer avec efficacité. Il doit approuver les projets modifiant l’organisation où il prend des initiatives dans ce sens. Au cours de ses vérifications journalières, il est à même de recueillir une expérience étendue et de faire bénéficier immédiatement toutes les organisations municipales des constatations faites dans l’une d’elles en matière de défectuosités ou de perfectionnement.

d) Certaines grandes administrations (l’aviation en France, par ex.) en arrivent à constituer de véritables intégrations de toutes les techniques. Son organisation se compose de services complets et parallèles où le nombre de freins est réduit au minimum et où chacun suit directement son travail : le service de recherches, le service technique, le service de fabrication, le service des bases extérieures et, pour l’information de tous, le service de l’Office de Documentation

e) En même temps, on assiste à la création, au sein même de l’administration, d’organes de coordination et de liaison. Citons les transformations apportées aux organismes du Gouvernement central en Angleterre à l’avènement du Gouvernement travailliste ; les plans présentés en France pour faire de la Présidence du Conseil un organe coordinateur entre les divers Ministères (travaux du groupe d’études administratives Fayol à ce sujet). Le plan mis en œuvre en Serbie-Croatie.

f) De loin, dans divers pays, on organise la mobilisation de la nation en cas de guerre. Une vaste organisation corrélative s’en est suivie, mi-militaire, mi-civile.

5. — La rationalisation du progrès.

En fait, aujourd’hui toutes forces actives de la Société sont en lutte contre la routine et l’empirisme pour le progrès et la rationalisation. Mais il a été démontré à surabondance que la routine trouve un point d’appui dans les règlements administratifs qui, par la lenteur de leur élaboration, sont le plus souvent en retard sur la technique, même au jour de leur approbation. Une meilleure documentation de l’administration obviera en partie à ce vice rédhibitoire. Les règlements administratifs doivent prendre aujourd’hui une forme souple pour s’adapter au progrès. Leurs données essentielles doivent périodiquement être revues et corrigées à la lumière des résultats nouveaux. Une collaboration incessante est nécessaire, entre les administrations, les organismes scientifiques, les grandes industries.

6. — La Science et l’Administration.

Le rôle de la science a été graduellement introduit dans les affaires sociales et la science y vient agir à la fois sur l’administration et sur la documentation.

a) Au temps de l’autocratie, c’étaient les conseillers privés du Prince, personnes choisies arbitrairement par lui et dont les avis donnés secrètement ne devaient pas nécessairement être suivis.

b) Puis vint l’organisation d’une hiérarchie de fonctionnaires faisant rapports et propositions, mais c’étaient des agents payés, ne jouissant d’aucune indépendance d’esprit. Le problème reste d’ailleurs ouvert, aujourd’hui encore, du droit du fonctionnaire quant à l’obéissance aux ordres irrationnels ou soulevant l’objection de sa conscience.

c) Les experts ont été nommés ensuite.[2] Ils sont désignés à raison de leur compétence connue et ils sont supposés libres de toute entrave dans l’exposé de leur opinion. Simple supposition cependant, car le fait même de leur désignation implique un choix intéressé et, en fait, l’expert est rarement indépendant.

d) L’organisation objective de la fonction scientifique en fixant par un statut régulier les rapports entre les pouvoirs publics et leurs administrations, d’une part et, d’autre part, les organismes savants indépendants avec les travaux ou services dont Ils sont chargés par conventions.

  1. Rapport de Maurice Félin, dans l’Administration locale. 1930. p. 938.
  2. Mi-janvier 1930, le Gouvernement espagnol faisait paraître une note officieuse contenant ce passage : « Persuadé de l’injustice de la campagne de diffamation qui est menée à l’étranger contre la situation économique de l’Espagne, le Gouvernement a décidé d’inviter quatre ou six experts étrangers en sciences économiques et financières à visiter l’Espagne et à étudier la situation afin d’émettre un avis autorisé. »