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BIBLIOLOGIE

L’Académie des Sciences de Leningrad a établi un nouvel alphabet latin. Une conférence de Chinois et de Mongols a été convoquée à Vladivostok en vue de l’adaptation à la langue chinoise en se fondant sur les intérêts de la culture et des lecteurs en général qui ne connaissent que peu l’alphabet latin. Des sons existent en bulgare expressibles seulement en cyrillique. Certains reconnaissent que si la Russie donnait l’exemple, il faudrait suivre.

En Russie il est mené une campagne intensive pour l’introduction de l’alphabet latin. L’alphabet russe y fut introduit par Pierre le-Grand. (Petrus I.)

En Russie même la question n’a pas encore été tranchée. On redoute de voir tomber dans l’inutilisation le million de livres existant dans les bibliothèques et qui auraient été lus comme le sont maintenant les livres en slavon ecclésiastique. Pendant longtemps, il faudrait considérer des millions de Russes comme illettrés jusqu’à ce qu’ils aient acquis la connaissance du nouvel alphabet. On a proposé un moyen terme : employer l’alphabet latin pour une partie de la production des livres, en particulier pour les livres qui s’adressent aussi à l’étranger.

c) L’adoption des caractères latins est déjà réalisée en Turquie. Le premier dictionnaire mixte turc-allemand en caractères latins avec la nouvelle orthographe vient de paraître (composé par Mehmed Ali, 15.000 mots). La réforme est adoptée aussi dans certaines régions de l’Union Soviétique. Le Gouvernement de Chypre lui fait une place. En Perse, la presse le demande.

L’adoption de l’alphabet latin à la place de l’écriture arabe en Turquie est entrée en vigueur partiellement le 1er décembre 1928 et complètement le 1er juin. À cette date, tous les documents officiels ont été imprimés en nouveaux caractères. Les nouveaux caractères vont faciliter l’étude de la langue turque aux étrangers et aider ainsi indirectement au commerce.

d) L’écriture chinoise se compose de 40.000 signes. La Science dans ces conditions est la culture exclusive de la mémoire, c’est à-dire de la partie matérielle de l’intelligence qui ne peut que s’atrophier par un semblable exercice. Une vie d’homme suffit à peine à l’apprendre. L’écriture est encore un obstacle au progrès de la civilisation. Elle a contribué dans une proportion considérable à arrêter l’évolution progressive du peuple.

Il faut connaître plus de trois mille caractères différents pour entreprendre la lecture de l’ouvrage le plus simple, il en faut 40, 000 pour les œuvres de lettrés. Le peuple ne sait donc pas lire. Aussi les Chinois ont-ils ouvert des salles où se tient un personnage qui lit à haute voix les journaux. Puis des rénovateurs sont venus qui ont simplifié l’écriture et les lettrés se mettant résolument à l’œuvre, firent front aux vieux préjugés, qui considéraient comme une honte véritable d’écrire la langue qui se parle et fondèrent des journaux dont la lecture est accessible aux plus humbles. On continue à faire usage de caractères idéographiques, mais les mots ont exactement la même sonorité que le langage oral ; de plus la forme des phrases est celle du discours ordinaire.

Grâce au Dr. Hu Shik, le langage parlé est devenu en Chine, après 1930, le langage écrit, mettant fin à l’isolement intellectuel où se trouvait le peuple, à raison du langage littéraire des lettres. Ce fait permet au mouvement pour l’éducation des masses dirigé par M. Y. C James Yen, à rendre l’enseignement accessible à toutes les classes.

Maintenant des tentatives sont faites pour écrire le Chinois en caractères romains avec 24 lettres auxquelles on devrait ajouter 10 autres, comme par ex. le ñ espagnol qui a son correspondant hollandais flamand dans le nj (méthode de Mgr Poanco o. f. m. Vicaire apostolique de Jenanfoe, Chine).

f) On s’est occupé au Japon de la réforme graphologique. Plusieurs hommes éminents du Japon, ayant à leur tête M. Hayashr, qui fut ambassadeur à Londres et Ministre des Affaires Étrangères à Tokio, s’occupent de la question. Déjà un groupe progressiste publie une revue imprimée en caractères latins. Cet alphabet rendrait des services pour le commerce, mais il est insuffisant pour la langue littéraire.

g) M. Bean a créé en Indo-Chine deux journaux annamites, dont l’un en caractères latins. (Cokner annamite transposé en caractère français.)

h) M. Takanadate, professeur à l’Université de Tokio, a proposé à la Commission des Coopératives Intellectuelles de recommander à tous les pays d’étudier la possibilité d’adopter les caractères latins dans leur langage écrit et lorsqu’il y a des systèmes d’orthographe différents en vigueur, d’unifier l’orthographe le plus possible, conformément à la nature de chaque langue. La Commission s’est prononcée en faveur de l’importance d’une méthode de transcription uniforme des langues à côté de l’écriture nationale en vue d’une meilleure compréhension mutuelle des peuples.

4o Il y a lieu de chercher la rationalisation et la standardisation de l’alphabet.

a) Un mouvement s’est fait jour pour le perfectionnement international de l’alphabet latin : des caractères de plus en plus clairs, la réforme des écritures cursives, dessin nouveau d’alphabets, abandon progressif de certaines lettres comme J et Y.

b) En langue internationale, on a cherché à éviter les signes qui causent des difficultés comme z, y, œ, etc. On se sert de signes simples pour des combinaisons fréquentes de son (x, c, etc.).[1]

c) Les caractères de l’écriture ont évolué depuis trente siècles sans méthode, dit M. Javal et la typographie même présente de sérieux inconvénients pour l’hygiène

  1. Baudoin, Marcel. Nécessité d’un alphabet international. Bull. Inst. Inter. Bibliogr., 1900. v. p. 155-188.