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ne parle de rien tant que de ce qu’on ne connaît point, il existe prodigieusement d’ouvrages sur ce sujet. On a beaucoup vu, beaucoup entretenu, beaucoup décrit le diable. On l’a fait parler, on l’a fait écrire. Mais combien les témoignages sont divers, combien singuliers, combien contradictoires ! Et quel dommage !

Et je me rappelai l’innombrable quantité de livres, qui de près ou de loin touchent à Satan.

Je considérai de nouveau le portrait de ce diable-ci. C’était la plus ancienne, la plus connue et la meilleure figure de diable. Deux yeux ronds et bridés, une bouche fendue jusqu’aux oreilles, un nez crochu, des cornes, des membres velus et bien musclés, des griffes aux pieds et aux mains, une longue queue qui serpentait dans le fond, l’air plutôt bête que méchant, mais surtout étonné… étonné je ne sais pourquoi… il en avait mille raisons… c’était peut-être un hasard de l’opération lithographique ; mais enfin la naïveté, l’ébahissement, la plus parfaite bonhomie se peignaient sur ce visage diabolique.

Il était bravement campé parmi les nues, comme j’ai dit, les bras et les jambes écarquillés dans une attitude de matamore, pour répondre aussi décemment que possible à l’idée que le peintre et le public devaient avoir de lui.

Les diablotins étaient faits à son image, mais on les avait visiblement moins soignés ; ils me parurent moins dangereux que ces bonbons emmaillotés de papier qui portent leur nom et qui donnent la colique aux enfants.

Je daignai à peine les examiner, et je reportai mes yeux sur le diable en chef.

Je réfléchis à tout ce qui s’appliquait, dans l’esprit des