Page:Owen jones - Grammaire de l ornement, 1856.djvu/207

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
ORNEMENTS CELTIQUES.

des Romains, mais on la trouve rarement dans nos premiers manuscrits. Une autre forme simple est celle qui est connue sous le nom de triquètre, et qui est fort commune dans les manuscrits et dans les objets travaillés en métal. La figure 36, planche LXIV., présente un exemple de quatre de ces triquètres introduits dans le motif. Les figures 30 et 35 de la même planche représentent des modifications de ce dessin.

Un autre ornement caractéristique, qu’on employait en profusion dans les plus anciens ouvrages de tout genre, se composait d’animaux monstrueux, tels que oiseaux, lézards et serpents de différentes espèces, allongés généralement outre mesure et garnis de nœuds, de queues et de langues qui s’étendaient en longs rubans entrelacés, s’éntremêlant et se contournant de la manière la plus fantastique ; quelque fois d’une manière symétrique, mais le plus souvent d’une manière irrégulière, dessinés qu’ils étaient de manière à servir de remplissage dans certains endroits. Quelquefois, mais pas souvent, on introduisait aussi la figure humaine ; comme sur un des panneaux de la croix de Monasterboice, au palais de Cristal, où l’on voit quatre figures humaines singulièrement entrelacées ; et sur une des bosses de la crosse de Lismore, appartenant au duc de Devonshire, on voit plusieurs de ces groupes fantastiques. Sur la planche LXIII. il y a des groupes d’animaux entrelacés de la même manière. Les exemples les plus compliqués sont les groupes de huit chiens (planche LXV., fig. 17) et de huit oiseaux (planche LXV., fig. 15) pris d’un des manuscrits de St. Gall ; mais l’exemple le plus élégant, c’est l’ornement marginal (fig. 8, planche LXV.) pris des évangiles de Mac Durnan, palais de Lambeth. Dans les manuscrits irlandais et gallois plus récents, les bords des rubans entrelacés se touchent, et les dessins sont bien moins géométriques et plus confus. Le dessin étrange (fig. 16, planche LXV.) n’est autre chose que la lettre initiale Q du psaume, Quid Gloriaris, et il est pris du psautier de Eicemarchus, évêque de St. David, 1088. Ce dessin doit représenter un animal monstrueux pourvu de nœuds dont l’un s’étend sur le devant au dessus du nez, et l’autre forme un crochet étrange au dessus de la tête, le cou est garni d’une rangée de perles, le corps est allongé et anguleux et se termine en deux jambes tordues pourvues de griffes féroces, et la queue est tellement nouée que l’animal aurait du mal à la débrouiller. Très souvent on n’employait que les têtes d’oiseaux et d’animaux pour former la terminaison d’un dessin, comme on peut le voir dans plusieurs ornements reproduits planche LXIV., et en effet la gueule béante et la langue allongée fournissent un fini qui ne manque pas de grace.

Le plus caractéristique de tous les dessins celtiques c’est celui qui se produit par deux ou trois lignes spirales, partant d’un point fixe, et dont les extrémités opposées s’élancent vers le centre des cueilles formées d’autres lignes spirales. Les figures 1, 5, et 12, présentent des exemples de cet ornement, reproduits tous sur une échelle plus ou moins agrandie ; tandis que la figure 22 représente la grandeur réelle. La figure 3, planche LXIII., montre comment ce dessin peut être converti en un dessin diagonal. Dans les manuscrits, de même que dans tous les meilleurs ouvrages en métal et en pierre, qui datent d’une époque plus ancienne, ces lignes spirales prennent toujours la direction de C, jamais celle de S. Cette circonstance prouve, ce que l’irrégularité du dessin même tend déja à démontrer, savoir, que l’ornement central de la figure 1, planche LXIII., n’a pas été tracé par un artiste versé dans les dessins réellement celtiques, et trahit ou la négligence ou la présence d’une influence étrangère. On a appelé ce dessin, le dessin à trompette, parceque l’espace entre les lignes, forme un dessin allongé et courbe qui ressemble à l’ancienne trompette irlandaise, dont l’embouchure est indiquée par un ovale en points, placé transversalement au bout le plus large. On rencontre des exemples du même motif exécutés sur les objets en bronze, d’un pied de diamètre environ, qu’on a trouvés de temps en temps en Irlande ; et on ne sait à quel usage ils ont pu servir ; on le voit aussi sur les petites plaques circulaires émaillées, ouvrages Anglo-Saxons d’une période reculée, qu’on a trouvées dans différents endroits en Angleterre. Mais il se voit rarement sur pierre ; le seul exemple que nous en connaissons en Angleterre se trouve sur les fonts baptismaux de l’église de Deerhurst. Comme cet ornement ne se

93