Page:Ozanam - Œuvres complètes, 2e éd, tome 01.djvu/50

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ruines, une société nouvelle, capable de posséder le vrai, de faire le bien et de trouver le beau.

En présence d’un dessein si vaste, je ne me dissimule point mon insuffisance : quand les matériaux sont innombrables, les questions difficiles, la vie courte et le temps plein d’orages, il faut beaucoup de présomption pour commencer un livre destiné à l’applaudissement des hommes. Mais je ne poursuis point la gloire qui ne se donne qu’au génie : je remplis un devoir de conscience. Au milieu d’un siècle de scepticisme. Dieu m’a fait la grâce de naître dans la foi. Enfant, il me prit sur les genoux d’un père chrétien et d’une sainte mère ; il me donna pour première institutrice une sœur intelligente, pieuse comme les anges qu’elle est allée rejoindre. Plus tard les bruits d’un monde qui ne croyait point vinrent jusqu’à moi. Je connus toute l’horreur de ces doutes qui rongent le cœur pendant le jour, et qu’on retrouve la nuit sur un chevet mouillé de larmes. L’incertitude de ma destinée éternelle ne me laissait pas de repos. Je m’attachais avec désespoir aux dogmes sacrés, et je croyais les sentir se briser sous ma main. C’est alors que l’enseignement d’un prêtre philosophe[1] me sauva. Il

  1. M. l’abbé Noirot, professeur de philosophie au collège de Lyon.