Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 10.djvu/291

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renferme avec un journal ou avec un livre. J’apprécie maintenant par la privation tout ce que vaut, le commerce de la parole vivante, combien il féconde plus la pensée que la lettre morte des plus grands écrivains. J’ai besoin d’entendre parler, et je ne rencontre guère, soit au palais, soit à l’église, soit dans les sociétés, qu’un langage trivial et mesquin. Je me sens trop jeune encore pour me passer. de modèles et de maîtres, et je rencontre rarement des modèles et des maîtres que je voulusse accepter. Mais je m’en passerais encore si j’avais quelque dédommagement dans les entretiens et les sympathies des jeunes gens de mon âge. Qu’il est fâcheux pour moi, mon excellent ami, que vous ne soyez pas Lyonnais !

Une distraction me reste dans les travaux littéraires auxquels je puis encore me livrer, mais avec des interruptions si nombreuses, et une telle difficulté d’exécution que je crains souvent d’être attaché par l’amour-propre seul à cette plume ingrate qu’il vaudrait peut-être mieux briser. J’ai cependant un service à vous demander. Dans trois semaines environ, j’aurai terminé de copier ma thèse sur Dante qui est devenue un volume. Me permettrez-vous de vous l’adresser, et de vous prier, après l’avoir lue, de la porter chez M. le Clerc, doyen de la faculté des lettres, à l’examen duquel elle doit être soumise ? Ainsi je diminuerai d’autant les délais que j’aurai à subir en arrivant à Paris.