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LXIV
À M. DUFIEUX.
Paris, 10 juin 1851.

Mon cher ami,

Je vous déclare que nous nous brouillerons, si vous continuez à vous moquer de moi, comme vous faites, avec l’excès de vos ’éloges. Sans doute l’amitié a bien la moitié du bandeau de l’amour mais,vous y voyez encore trop clair, et vous avez trop d’esprit pour ne pas apercevoir tout ce qui me manque. D’ailleurs, comme chrétien, vous ne devez pas tenter d’orgueil un ami qui, en sa qualité d’homme de lettres, n’est que trop sujet à ces tentations. Mais il y a deux sortes d’orgueil : celui qui est content de soi, c’est le plus commun et le moins mauvais et celui qui est mécontent de soi, parce qu’il attend beaucoup de lui-même et qu’il est trompé dans son attente. Cette seconde espèce, bien plus rafinée et plus dangereuse, est la mienne. Je ne suis nullement satisfait de ma personne, et j’ai trop de raisons de ne l’être pas. Au