Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 11.djvu/431

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du noir tout à son aise : je suis bien moins troublé de mes maux présents que de leurs conséquences probables. Les pensées de la foi n’ont pas assez d’empire pour m’arracher à ces tentations. Je ne dis point certes que la religion soit impuissante même sur mon misérable cœur elle me préserve du désespoir, elle me donne tous les jours quelques rayons de lumière, elle m’empêche souvent de livrer un champ libre à mes tristesses. Mais je n’ai pas la force d’en faire davantage, je ne réussis pas à. me contenir tout à fait, et je ne crois pas offenser Dieu en me laissant aller à cet épanchement auprès d’un ami qui est plus ferme que moi et qui peut me tendre une main secourable.

Cependant je suis un ingrat. Car en m’enlevant a mes amis, à mes goûts, à mes études, la Providence a tout fait pour m’adoucir la peine de cet éloignement. J’ai vu des pays superbes, des montagnes dont les beautés m’ont ravi, tout brisé que j’étais de fatigue et de découragement. Nous avons vécu et nous vivons au milieu de populations chrétiennes, qui nous donnent la consolation de savoir que la foi n’est pas éteinte en France. Enfin je trouve à Bayonne une conférence de Saint-Vincent de Paul très-florissante, bien pénétrée de notre premier esprit, infatigable aux bonnes œuvres. Plusieurs membres de cette conférence m’ont fait le plus aimable accueil. Bayonne a aussi une belle cathédrale gothique, d’une forme élancée, élégante