Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 4.djvu/116

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En même temps que la réforme de saint Colomban inquiétait la faiblesse des gens d’Eglise, elle n’épargnait pas les vices des hommes de guerre. Thierry II avait hérité du royaume de Bourgogne : il vivait, dans ces habitudes de polygamie que la loi barbare autorisait, et dont le christianisme ne corrigea que lentement les rois mérovingiens. Colomhan le pressait de chercher les douceurs d’un mariage légitime (ce sont les expressions de la légende), afin que la race royale sortit d’une reine respectée et non pas d’un lieu de prostitution. Mais Brunehaut, l’aïeule du roi, comme une autre Jézabel, s’opposait aux exhortations du saint ; car si les concubines étaient chassées et qu’une reine fût mise à la tête de la cour, elle craignait de perdre une partie de sa dignité et, de ses honneurs. Il arriva donc qu’un jour le bienheureux Colomban vint trouver Brunehaut, comme elle séjournait, au manoir de Bourcheresse. Et, l’ayant vu dans la cour, elle lui conduisit les fils, que Thierry avait eus de ses adultères : « Voici , dit-elle, les fils du roi : fortifie-les de ta bénédiction. » Le saint répondit : « Sache que ceux-ci ne porteront jamais le sceptre royal, car ils sortent d’un mauvais-lieu. » Et Brunehaut furieuse ordonna aux enfants de se retirer. Mais les fureurs de Brunehaut ne pardonnaient pas. Elle souleva les colères des grands et du clergé contre cet étranger, qui s’écartait des coutumes reçues. Le roi Thierry se