Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 4.djvu/568

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terre étrangère, à condition qu’il lui fût permis d’y vivre dans la solitude, et qu’on lui fît venir au moins « quelques-unes de ses fleurs d’Angleterre » c’est ainsi qu’il nommait ses livres. Le roi l’établit donc dans l’abbaye de Saint-Martin de Tours ; il l’environna de tous les dehors d’une opulence que son caractère de simple prêtre, non de moine, ne réprouvait pas tes domaines qu’il lui donna comptèrent jusqu’à vingt mille serfs. Mais le savant vieillard, humilié de cette abondance terrestre, n’avait d’ardeur que pour l’avancement spirituel de ses disciples. Ce n’était pas assez de se multiplier lui-même, et de leur donner, comme il dit, « le miel des Écritures, le vin de la science antique, les premiers fruits de la grammaire, les flambeaux de l’astronomie » il avait appelé les plus habiles de ses élèves d’York à partager ses fatigues. Le nombre des pèlerins anglo-saxons qui venaient grossir l’école de Tours avait fini par fatiguer l’hospitalité des Francs. On raconte qu’un jour, quatre d’entre eux se tenaient sur la porte, quand le prêtre Aigulf entra pour visiter Alcuin et l’un d’eux s’écria, dans la langue maternelle « Grand Dieu, quand délivrerez-vous ce logis des Bretons, qui viennent, comme autant d’abeilles, tourbillonner autour de ce vieux Breton ? » Mais le voyageur avait tout compris et, un moment après, Alcuin, envoyant chercher les moqueurs, exigea pour leur châtiment qu’ils