Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 7.djvu/33

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~ a dit qu’il avait là quantité d’or, de perles et de pierreries, et que, ne pouvant emporter ce grand avoir avec lui, il les priait de lui prêter sur ces deux coffres ce dont il avait besoin. Et les juifs lui prêtèrent trois cents marcs d’or et trois cents d’argent. Mais, quand le Cid eut pris Valence, il renvoya les trois cents marcs d’argent et les trois cents d’or pour dégager ses deux coffres de sable, priant Rachel et Bidas de lui pardonner, car il l’avait fait avec chagrin[1] . » -Ce dernier trait me touche. Je croyais le Castillan ravi d’avoir joué un si bon tour à deux infidèles. Mais son honneur chrétien en souffre, et il a besoin de pardon. L’Achille de l’Espagne ne restera pas en repos sous sa tente au bout de sa lance désormais libre et souveraine, il porte la guerre aux mécréants. Il n’aura pas de paix qu’il n’ait enlevé Valence, «l’honneur et la joie des Maures, la ville aux fortes murailles, dont les blancs créneaux reluisaient de loin au soleil[2]. » Le siége sera long et la famine cruelle. « Le père ne donne plus de conseil au fils, ni le fils au père, ni l’ami à l’ami ils ne peuvent se consoler. C’est une mauvaise condition, seigneurs, de manquer de pain, de voir mourir de

  1. Cronica del Cid, cap.XC et CCXIV. Je reviens ici à la Chronique dont le récit est plus court.
  2. Expressions d’une complainte arabe sur la prise de Valence, publiée pour la première fois dans la préface du Cancionero de Baena.