Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 7.djvu/438

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de sa conduite envers ses sujets catholiques, lorsque le pieux Campian et huit de ses compagnons

venaient de mourir pour n’avoir pas voulu adhérer à l’Église établie.[1] Il ne rougit pas de parler de la bienveillance de ses rapports avec les peuples

  1. Vers la même époque, en répondant à un libelle dirigé contre le gouvernement de la reine, Bacon écrivait ces lignes que j’aime à traduire et à citer, comme jetant quelques lumières sur les causes qui introduisirent et propagèrent le protestantisme en Grande-Bretagne. «La pureté de la religion est un bienfait inestimable, inconnu au temps de nos anciens rois, jusqu’au jour du père de Sa Majesté Henri VIII, de fameuse mémoire. De cette pureté de la religion sont résultés trois avantages temporels d’une grande importance. Le premier, c’est de retenir dans le royaume des sommes considérables qu’autrefois on envoyait annuellement à Rome ; le second, c’est d’avoir divisé les revenus immenses que les monastères dépensaient jadis inutilement, et de les avoir employés à élever des familles puissantes, qui sont la force de l’État et l’éclat de la couronne ; le troisième enfin, c’est d’avoir affranchi l’autorité royale de tout supérieur étranger, et de l’avoir affermi en l’isolant. » On peut remarquer, sur le premier point, que Bacon semble appliquer ici ses principes en matière d’ingratitude : était-il bien digne de l’opulente Angleterre, après avoir reçu de Rome la magnifique aumône du christianisme et de la civilisation, de marchander ensuite le denier de Saint-Pierre et d’apostasier par économie ? Sur le second point les dépenses inutiles des monastères, c’étaient les écoles, les établissements charitables, les admirables monuments dont l'Ile des Saints était couverte avant l’époque de la réforme ; les héritiers de ces dépouilles, c’est le clergé marié, plus riche à lui seul que tout le clergé de l’Europe ce sont les lords oppresseurs, c’est cette aristocratie territoriale qui fait qu’aujourd’hui, sur vingt-quatre millions d’habitants, les trois royaumes ne comptent qu’un million de propriétaires, tandis que la septième partie de la population est inscrite au rôle des indigents. Sur le troisième point : en isolant l’autorité souveraine, on l’a rendue tyrannique, capricieuse et non pas sûre ; l’histoire des Stuarts est là pour en déposer. Ainsi le despotisme et l’avarice, tels sont les deux génies que l’on voit accroupis auprès du berceau de l’anglicanisme.