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time, et allèrent piller le monastère. Ainsi périt, à l’âge de cinquante-trois ans, Thomas Becket, archevêque de Cantorbéry[1].

V

Lorsque deux hommes, au moyen âge, s’en remettaient au jugement de Dieu, ils combattaient en champ clos : le bon droit devait se trouver du côté où se rangerait la victoire, et l’ignominie accompagnait la défaite ou la mort. C’était peut-être un vieux reste de paganisme, de culte de la nature qui, donnant à tout phénomène physique une portée mystérieuse, divinisant la force brutale, faisait plier toute chose sous une loi de terreur. La querelle de Thomas avait fini par une sorte de combat où la vertu s’était trouvée aux prises avec le crime le crime avait vaincu par le fer. D’après la législation barbare de ce temps, Thomas ne vivait plus, il était condamné.

Mais il est une autre loi, une loi d’amour selon laquelle le droit est dégagé du fait, qui reconnaît une justice invisible, qui ne s’arrête point devant le silence de la mort, et qui entend la voix du sang versé. Devant cette loi, celui-là triomphe qui a le

  1. Ce récit tout entier est emprunté littéralement au Quadrilogium, dont les auteurs furent témoins oculaires des derniers moments de S. Thomas, et durent en garder un inaltérable souvenir.