Page:Pétrarque - Lettres de Vaucluse, trad. Develay, 1899.pdf/13

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fondirent sur ma maison de campagne mal gardée, enlevèrent ce qu’ils pouvaient emporter, brûlèrent le reste et mirent le feu au petit ermitage où je méprisais les domaines de Crésus. La vieille voûte résista à l’incendie, car ces scélérats étaient pressés. J’avais laissé là en partant quelques livres que le fils de mon métayer, prévoyant ce qui arriverait, avait transportés dans le donjon. Persuadés qu’il était inexpugnable, comme il l’est, mais ne le sachant pas inhabité et sans défense, comme il l’était, les brigands s’en allèrent. C’est ainsi que mes livres échappèrent, contre toute espérance, à cet affreux danger, Dieu n’ayant pas voulu qu’un si noble butin tombât entre des mains si indignes.

Fiez-vous donc maintenant aux profondes retraites de ce Vaucluse ! Rien n’est clos, rien n’est haut, rien n’est obscur pour les voleurs et les brigands ; ils pénètrent partout, ils voient et fouillent tout. Point d’endroit si fortifié et si élevé que n’escalade la cupidité armée et l’avarice dégagée des liens des lois. Oui vraiment, lorsque je songe à l’état présent du lieu et que je me souviens du passé, je ne puis croire que ce soit là où j’ai erré la nuit, seul et sans crainte, sur les montagnes. Mais consultant plutôt le