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Page:Paléologue - Vauvenargues, 1890.djvu/82

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VAUVENARGUES.

que lui causa le renoncement à la vie active. « Je suis au désespoir, écrivait-il à son ami Saint-Vincens, d’être réduit à un parti qui me répugne dans le fond autant qu’il déplaît à ma famille ; mais la nécessité n’a point de loi. » Ailleurs, parlant de l’homme d’action qui s’est condamné à être homme de lettres, il faisait allusion à ces « luttes intérieures » qu’il livre en lui « contre les dégoûts et les humiliations de son métier[1] ». Il déplorait aussi la triste condition de celui qui, tandis que les autres hommes accomplissent de brillantes existences , doit se résigner à les raconter. Il disait enfin, comme pour se consoler d’avoir abandonné les traces des héros de l’action, des Richelieu, des Condé, des Turenne : « Si nous ne sommes pas à même d’exécuter de si grandes choses que ces hommes illustres, qu’il paraisse du moins, par l’expression de nos pensées, que nous n’étions pas incapables de les concevoir[2] ».

Qui sait pourtant si la destinée ne lui fut pas charitable de le soustraire à l’obligation de poursuivre plus longtemps son glorieux idéal. Réunissait-il bien en lui les conditions nécessaires pour l’atteindre ? Dans son amour de la vie active, ne se faisait-il pas illusion sur son aptitude à la pratiquer ? Ses qualités étaient-elles vraiment celles par

  1. Essai sur quelques caractères, § 60.
  2. Réflexions sur divers sujets, § 52.