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Cette conception, soutenue en Allemagne par Simmel, et en France par M. Bouglé, renferme une part de vérité. Elle a l’avantage de mettre en lumière ce fait que le nombre, la masse, la population des groupements sociaux exercent par eux-mêmes une grande influence sur l’évolution de ces groupements. Toutefois on peut adresser à cette définition les objections suivantes : 1o Cette sociologie stricto sensu, comme l’appelle M. Bouglé, ne peut se constituer que concurremment avec les différentes études particulières, dont l’ensemble composerait la Sociologie lato sensu. — On ne peut déterminer les lois abstraites qui régissent les modalités des groupements sociaux en général, qu’après avoir étudié dans le détail ces groupements eux-mêmes. 2o Il est un contenu dont il est impossible de faire abstraction : c’est le contenu psychologique des groupes étudiés. Car c’est en idées, en croyances, en désirs, que se traduisent finalement tous les phénomènes statiques ou dynamiques dont se compose la vie des sociétés. La notation psychologique reste celle à laquelle se ramènent en définitive toutes les autres. Faire abstraction, comme le demande M. Bouglé, des « idées des unités sociales » pour s’attacher aux lois purement formelles des groupements, c’est abandonner de gaieté de cœur ce qu’il y a de plus réel et de plus concret dans la vie sociale ; c’est lâcher la proie pour l’ombre[1].

À nos yeux, la Sociologie n’est autre chose que la Psychologie sociale. Et nous entendons par Psychologie sociale la science qui étudie la mentalité des unités rapprochées par la vie sociale.

Nous n’éprouverons aucun scrupule si l’on nous objecte que cette définition ramène au fond la Psychologie sociale et par suite la Sociologie elle-même à la Psychologie individuelle. — À nos yeux, c’est à cette dernière qu’il faut toujours en revenir. Elle reste, qu’on

  1. Bouglé, Les Idées égalitaires, p. 18 (Paris, F. Alcan).