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Eh bien ! je ne voudrais pas terminer cette étude forcément incomplète et sommaire sans faire un plaidoyer en faveur de nos mots canadiens, ces mots qui sont bien à nous, qui fleurent bon le terroir ; que nos pères ont apportés de Normandie, du Poitou ou de la Vendée et que pieusement ils ont conservés, les transmettant de génération en génération ; ces mots pittoresques, imprégnés de la poésie un peu vétuste des choses anciennes mais qui sont encore vivants, allègres, primesautiers ; mots magiques évocateurs d’un passé glorieux ; ces mots que les puristes persécutent et veulent reléguer dans l’ombre.

Eh bien ! je voudrais qu’on leur accorde droit de cité, qu’on ne les considère plus comme des parias, les faisant apparaître sous la toilette typographique de l’italique, flanqués de guillemets, comme un malfaiteur de gendarmes.

Les mots de chez nous, c’est notre trésor à nous ; nos locutions propres, c’est notre richesse.

Au contact des lèvres canadiennes, les mots anglais ont perdu leur morgue et leur dureté… Ils se sont adoucis. Alors, pourquoi, à eux aussi, ces derniers venus dans les rangs, ne pas accorder droit de cité ?

La langue d’un peuple se forme par l’usage. Le besoin la crée.

La formation de nos mots est logique. Tandis qu’en France, on adopte le terme anglais tout cru, chez nous, il se francise, il se modifie tellement qu’à peine on en reconnaît l’origine. Et puis, on n’y a recours qu’au cas de nécessité.

Par exemple, un skating rink bien que très français, n’a pas cours chez nous parce que nous avons patinoire et rond à patiner pour signifier la même chose ; si nous ne faisons pas de footing, c’est parce que nous aimons mieux faire une marche ou prendre une