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dames, réclamer enfin une certaine part dans leur bienveillance. La société, pour être différente de ce qu’elle est aujourd’hui, n’étoit pas alors dépourvue de tout agrément et de toute politesse : les femmes y jouoient un rôle souvent décisif. Dans les tournois, fêtes qui souvent se prolongeoient pendant plusieurs semaines, et qui réunissoient tous les jeunes chevaliers d’une province ou même d’un royaume, elles formoient une sorte de haute cour souveraine ; elles assistoient, mieux encore, elles présidoient aux combats et passes d’armes, recueilloient les suffrages, distribuoient les éloges et décernoient les prix. Dans l’intervalle des joutes et des banquets, elles régloient l’ordre des danses, des concerts d’instruments et de voix ; elles écoutoient les chants royaux, les rondeaux, virelais, sonnets et ballades ; tandis que les jongleurs, ces comédiens du temps, déclamoient ou plutôt jouoient pastorales et chansons de geste. Ainsi les hérauts d’armes, les jongleurs, les ménestrels et les trouvères étoient avec les dames l’âme de ces joyeuses, brillantes et splendides réunions. Comparez aux anciennes fêtes publiques ce que nous décorons aujourd’hui du même nom, et décidez à qui doit rester l’avantage sur ce point, du quatorzième siècle ou du dix-neuvième !

On entend volontiers Froissart parler de son amour des fêtes et des belles compagnies :

Trésque n’avoie que douze ans,
Estoie forment goulousant
De véoir danses et caroles,
D’oïr menestreus et paroles
Qui s’apartiennent à deduit ;
Et de ma nature introduit
D’amer par amours tous céaus
Qui aiment et chiens et oiseaux.
Et quand je fui mis à l’escole,
Où les ignorans on escole,