Page:Paris, Paulin - Romans de la Table Ronde, tome 4.djvu/315

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
307
la demoiselle de morgain.

dame, et j’en ai grand deuil, car je crains que vous ne vouliez pas me pardonner. » Elle tombe alors aux pieds de Lancelot qui la relève et la rassure de son mieux[1].

Il revint à son lit, la demoiselle au sien, et ils dormirent tranquillement le reste de la nuit. Le lendemain, quand il fut levé, la demoiselle propose de le conduire à un ermitage voisin pour y entendre une messe du Saint-Esprit ; ils s’y rendent : l’ermite offre de partager avec eux son frugal repas. Ils montent ensuite et arrivent dans une vaste lande ; un agneau n’y eût pas trouvé sa pitance. La voie était coupée par une rivière transparente, rapide et profonde. « Veuillez, dit la demoiselle, regarder sous les eaux : y voyez-vous le corps d’un chevalier armé de toutes armes, et debout devant une dame ? — Oui ; qu’est-ce là ? — Je vous le dirai :

« Ce chevalier avait tendrement aimé la dame qui est encore là près de lui et qu’on avait mariée à un baron félon et jaloux. Bien que son amour pour le chevalier eût toujours été exempt de blâme, car rien n’eût pu lui faire oublier ses devoirs de femme épousée, l’é-

  1. On trouve à plusieurs reprises l’imitation de cette jolie scène dans les Amadis, mais avec de nouveaux détails suffisamment accentués ici.