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mess. gauvain et lancelot.

vain, ce chevalier est de merveilleuse prouesse ; il n’y a que Lancelot que j’aie jamais vu exploiter de cette façon. »

Un écuyer arrive alors vers eux : « Seigneurs, leur dit-il, pourquoi ne rompez-vous pas une lance ? — C’est que nous pensions le nombre des jouteurs déterminé[1]. Nullement, qui veut tournoyer ici le peut faire ; il ne court d’autre danger que la perte de son cheval et de sa liberté. — Dites-moi, reprend messire Gauvain, quel est ce chevalier qui le fait si bien ? — Je ne le connais pas : vous pouvez voir seulement qu’il porte au cou un écu noir. »

Alors, les deux cousins entrèrent en lice : ils allèrent soutenir le parti opposé au preux chevalier et trouvèrent assez à faire. Mais à compter de ce moment ils restèrent maîtres du terrain, bien qu’au jugement de tous, le chevalier à l’écu noir eût mérité le prix des mieux faisants. Soit ou non le dépit de voir la victoire échapper aux siens, il s’était éloigné sans attendre qu’on le proclamât vainqueur. Arrivé dans la forêt et se croyant seul, il jeta son écu sur la voie ; mais messire Gauvain et messire Yvain ne l’avaient pas perdu de vue ; ils avaient

  1. « Nous cuidions que li tournoiemens fut à tanquum. » À tant quant ; tanti-quanti.