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ACTE V.

M’a tirée à la fin de cette dure peine.

ALCIONE’E.

Quelle Iſmene ?

STENOBE’E.

Quelle Iſmene ? Vne femme inconnue en ces lieux.
Et qui ſans doute ſort de la race des Dieux :
Enfin l’on peut iuger qu’elle eſt preſque diuine,
Et que des Immortels elle a prit origine.
Mes Filles, vous ſçauez quels eſtoient mes regrets,
Et vous avez ouy les propos indiſcrets,
Auſquels mes deſplaiſirs & mes maux m’ont contrainte ;
Alors que i’ay trouué pour alleger ma plainte,
Quand ie faiſois voler mes ſoupirs iuſqu’aux cieux,
Cette fameuſe Iſmene eſt paruë à mes yeux :
Vn lugubre torrent, de ſanglots & de larmes
M’ont empeſché de voir cette mere de charmes :
Mais lors qu’elle a parlé me ſurprenant ainſi,
Ses diſcours ont rendu mon mal bien adoucy.
Il n’eſtoit pas beſoing de luy dire la cauſe
Des maux que ie ſouffrois ; c’eſtoit trop peu de choſe
De paroiſtre à ses yeux auec tant de douleur :
Elle ſçauoit deſia le fonds de mon malheur.
Enfin ce grand ſçauoir, à qui rien ne ſeconde,
Fait voir qu’il n’eſt iamais de choſe ſi profonde
Qui ne luy ſoit connuë, aux lieux les plus cachez,
Quand on croit la fuyr, l’on s’en voit empeſchez,
Elle peut nous ſeruir, ou nous estre contraire,
L’on ne doit que taſcher de ne luy point déplaire :
Elle ſçait les malheurs qui doiuent arriuer,
Elle en peut garantir, elle peut en priuer.
Elle a ſçeu ma douleur ſans m’auoir iamais veuë,
Ainſi mes maux ont en l’allegeance impreueüe,
Elle m’a preſenté ce couſteau merueilleux,