Page:Peguy oeuvres completes 06.djvu/55

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Qui a tant aimé ces hommes.
Qui avait pris goût à eux, et à la terre, et à tout ce qui s’ensuit.

Et dans cette flotte innombrable je distingue nettement trois grandes flottes innombrables.

(Je suis Dieu, je vois clair).

Et voici ce que je vois dans cet immense sillage qui commence par cette pointe et qui de proche en proche peu à peu se perd à l’horizon de mon regard.

Ils sont tous l’un derrière l’autre, même ceux qui débordent le sillage

Vers ma main gauche et vers ma main droite.
En tête marche la flotte innombrable des Pater
Fendant et bravant le flot de ma colère.
Puissamment assis sur leurs trois rangs de rames.

(Voilà comme je suis attaqué. Je vous le demande. Est-ce juste ?)

(Non, ce n’est point juste, car tout ceci est du règne de ma Miséricorde)

Et tous ces pécheurs et tous ces saints ensemble marchent derrière mon fils

Et derrière les mains jointes de mon fils.
Et eux-mêmes ont les mains jointes comme s’ils fussent mon fils.
Enfin mes fils. Enfin chacun un fils comme mon fils.

En tête marche la lourde flotte des Pater et c’est une flotte innombrable.

C’est dans cette formation qu’ils m’attaquent. Je pense que vous m’avez compris.

Le royaume du ciel souffre la force, et les hommes de force le prendront de force. Ils le savent bien. Mon fils leur a tout dit. Regnum cœli, le royaume du ciel.