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PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

relevés admirent les êtres doués de vie, comme les troupeaux, le bétail. D’autres encore plus cultivés admirent les êtres doués d’une âme raisonnable, non pas d’une âme prise dans toute la généralité de ce terme, mais de celle qui rend un être habile dans un art quelconque, ou qui le rend capable par son application d’acquérir peu à peu ce qu’il désire, comme par exemple un grand nombre d’esclaves. Mais quand on s’élève jusqu’à honorer l’âme raisonnable, universelle et sociable[1], alors on ne se soucie plus en rien d’aucune des âmes d’une autre espèce[2]. Par-dessus tout, on s’efforce de maintenir personnellement son âme dans un état constant de raison et de dévouement à l’ordre commun, dans une perpétuelle activité ; et l’on concourt avec ses semblables à atteindre ce but.

    leurs besoins ou à leurs désirs.

  1. L’âme raisonnable, universelle et sociable. C’est le degré le plus élevé de l’âme ; elle est douée de raison, elle comprend tout, elle se soumet à toutes les lois de la société où elle vit.
  2. D’aucune des âmes d’une autre espèce. C’est ainsi qu’il faut restreindre, à ce qu’il semble, l’expression un peu vague du texte. Il ne s’agit pas d’arriver à la conception de l’âme divine, mais seulement à la conception de l’âme douée de raison et capable de vertu, que l’homme porte en lui-même. La fin du paragraphe me semble le prouver.