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PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

XLIX

Est-ce que tu t’affliges de ne peser que tant de livres et de n’en point peser trois cents ? Ne t’afflige donc pas non plus de n’avoir à vivre que tant d’années et non davantage. Et de même que tu te contentes du poids qui a été assigné à ton corps, de même aussi sache te contenter du temps qui t’est accordé.

L

Efforçons-nous de persuader les gens ; mais, s’ils ne t’écoutent pas, n’en agis pas moins selon les lois de la justice, qui doit seule te conduire. Que si quelqu’un arrête ton action en t’opposant la force, tâche alors de bien prendre la chose et de ne pas t’en chagriner. Que l’obstacle même qui te gêne soit l’occasion pour toi de t’exercer à une autre vertu[1]. Souviens-toi que ton désir ne pouvait être que conditionnel, et que tu ne peux

  1. L’occasion pour toi de t’exercer à une autre vertu. Il n’y a guère de cas dans la vie où l’on ne puisse appliquer ce conseil. C’est prendre les choses du bon côté ; et le Stoïcisme a raison quand il croit que la misère et la douleur ne sont pas des maux véritables, si l’âme est assez forte pour les tourner au bien. Mais ces transformations morales ne sont qu’à l’usage