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LIVRE VIII, § XXI.

de leur origine et de leur existence. Elle ressemble assez à un joueur de ballon[1]. Est-ce donc un bien pour le ballon de monter si haut ? Est-ce un mal de descendre si bas, ou même de tomber tout à fait ? Est-ce un bien pour la bulle d’air de se soutenir ? Est-ce un mal pour elle de crever ? Est-ce un bien, est-ce un mal pour la lampe de briller ou de s’éteindre ?

XXI

Retourne un peu le corps[2] en tous sens, et demande-toi ce qu’en font la vieillesse, la maladie, la débauche. La vie est bien courte pour celui qui loue[3] et pour celui qui est loué, pour celui qui célèbre un nom illustre et pour celui dont le nom est célébré. Ajoute que ce bruit se fait dans un

    principe qu’Aristote a énoncé et justifié de toutes les manières : « La nature ne fait jamais rien en vain. »

  1. Elle ressemble assez à un joueur de ballon. La comparaison n’est peut-être pas très-juste ; et il n’est pas possible de croire que la Providence se joue de ses créatures, comme le joueur s’amuse du ballon, qu’il pousse. Les créatures humaines sont autre chose, sans parler de tous les autres êtres. Marc-Aurèle le sait bien et il l’a dit souvent ; c’est la rhétorique qui l’emporte et l’égare un instant.
  2. Retourne un peu le corps. L’idée de Corps n’est pas exprimée positivement dans le texte ; mais elle est évidemment sous-entendue.
  3. Pour celui qui loue. Voir plus haut, liv. IV,