Page:Pensées de Marc-Aurèle, trad. Couat.djvu/232

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à la loi. C’est ainsi qu’il n’y a aucune différence entre la raison droite et la raison qui fonde la justice.

2

Tu mépriseras le charme du chant, de la danse et du pancrace quand tu auras décomposé une voix mélodieuse en chacun de ses sons et que tu te seras demandé, à propos de chacun d’eux, si c’est là ce qui te ravit, car tu en auras honte; quand tu auras fait la même chose pour la danse, à propos de chaque mouvement et de chaque attitude ; et de même, enfin, pour le pancrace. Bref, pour tout ce qui n’est pas la vertu ou un effet de la vertu, va droit aux éléments des choses, et, par cette analyse, arrive à les mépriser ; applique le même procédé à la vie tout entière.

3

Quelle âme que celle qui, dès qu’il lui faut se séparer de son corps, est prête ou à s’éteindre, ou à se disperser, ou à subsister ! Il faut que cette disposition soit l’effet de son


i. [Couat : « elle ne met rien au-dessus d’elle-même et de la loi. » — Aug. Couat traduit ainsi les mots xai vô|iou, et laisse de côté les deux qui précèdent : ônep ïoiov, qu’il interprète sans doute comme une glose. Il est possible pourtant de comprendre, tel qui nous est parvenu, le texte des manuscrits. — Le rapprochement de l’âme raisonnable et de la loi est impliqué dans la définition de cette dernière, soit qu’on dise avec Cicéron: «C’est la raisou droite qui ordonne et défend» (supra IV, 4, i" note), soit qu’on fasse d’elle, comme Marc-Aurèle (supra VII, 19) la «commune raison de tous les êtres raisonnables». La phrase finale de la pensée, comme les deux définitions que je viens de rappeler, exprime l’accord absolu de la logique et de la morale.]

2. [Couat: «les règles de la raison et celles de la justice. » — Cf. supra IV, 12, 1" note.]

3. [Nous connaissons ce raisonnement. Dès le livre II (S i4; cf. aussi X, 7, note finale), M. Couat a protesté au nom de la conscience oubliée, et rappelé qu’un moment de la vie, que tous les moments de la vie, dès qu’on prétend les considérer isolément et qu’on n’en veut pas voir la suite ni le lien, ne sont pas la vie. De même l’harmonie est tout autre chose que des notes de musique : c’est une suite de rapports de sons, et ces rapports ont une réalité telle qu’il suffit d’intervertir et de mêler les notes pour que l’harmonie périsse. L’analyse que demande Marc-Aurèle implique déjà la négation des choses dont il veut, par ce moyen, démontrer le néant.]

4. [Couat: «ou à disparaître, ou à être dissipée, ou à subsister.»—Sur la destinée de l’âme et les trois hypothèses de l’extinction (aëeaOijvai), de la dispersion (axeSaaOr,vai) et du déplacement ou de la survivance (au|i|ieivai ou |leTaaTaai;), cf. supra IV, 2i, première et dernière notes ]

5. [M. Rendall (Journal of Philology, XXIII, p. i55) signale ici l’emploi non classique de îva (toûto, îva... ep^r/tai, ou apyr,Tai). Il le traduit par fac ut, c’est-à-dire qu’il admet devant cette conjonction (non devant Toûto) l’ellipse d’un verbe. Une telle ellipse dans de telles conditions est d’ailleurs fort rare en ancien grec. Sauf prop