Page:Pensées de Marc-Aurèle, trad. Couat.djvu/278

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Ce n'est pas sans doute la première fois (supra IV, 4, note finale; que MarcAurèle a distingué celle-ci de la terre, de l'eau, de l'air et même du feu: mais c'est la première où il semble se refuser à voir en elle un «élément ». Il montrera encore le même scrupule au cours de la pensée XI, 20 (Tà aToi^sîa unaxoiei... |iovov Tô voepôv aou àTOiOé;), et surtout au début de la pensée IX, 9, où, avant d'établir que la raison attire la raison, il écrira que le feu monte en l'air pour rejoindre le «feu élément». Jamais pourtant il n'a été plus ferme qu'ici en son matérialisme. Y aurait-il donc pour Marc-Aurèle de la matière hors des «éléments»? — Mais qui empêche de l'admettre, et de résoudre ainsi en la définition d'un mot l'apparente contradiction qui nous arrête?

J'estime donc qu'ici et dans les passages analogues Marc-Aurèle a pris le mot aTOiysîov dans son acception la plus usuelle, et par « les éléments » a simplement entendu « les quatre éléments ». Ainsi il ne serait pas absolument exact de prétendre que la raison n'est pas pour lui « un élément »; c'est « un des quatre éléments » qu'il faudrait dire, — et cela reviendrait presque à la présenter comme un cinquième élément.

Si l'on veut maintenant observer que pour Marc-Aurèle les astres sont divins (VIII, 19; IX, 9, 5' note), et que la raison, qui est le dieu intérieur (III, 5, etc.), doit être faite de la même flamme qu'eux; que la force intelligente (VIII, 54) embrasse tout et enveloppe tout, on arrivera à considérer l'éther, qui est au plus haut du monde (àvwTâTw |ièv o5v eïvai Tî> nïp, 8 Sr, aiOépa xaXeîaOai: Diogène, VII, 137), comme distinct des éléments ou comme un cinquième élément. D'après Stobée (Ed., I, 436), des Stoïciens qui ne séparaient pas comme Marc-Aurèle l'éther du « feu élément » prétendaient que celui-là se meut circulairemenl (to S' aîOepiov iiepiçepw; xiveîTai), à la différence de la lumière ou de la flamme terrestre dont le mouvement est rectiligne. Ici, lorsque Marc-Aurèle parle du déplacement circulaire d'un élément, ce n'est évidemment pas à l'éther qu'il pense; ce n'est pas non plus à la terre, ni à l'eau, ni à l'air, ni au feu terrestre, qui pour lui, comme pour les autres Stoïciens, montent ou descendent en ligne droite (XI, 20); c'est le « feu élément » qu'ici le mot xûxXw nous représente emporté (?opœ) dans le mouvement (xi'vr,oi;) du « feu artiste ».

Quant à la vertu, nous apprenons que le mouvement n'en est ni rectiligne ni curviligne. En la définissant « la raison droite » (Tusculanes, IV, i5, 34), les Stoïciens ne voulaient donc pas tant marquer la direction de sa route que le don qu'elle avait reçu de n'en pas dévier. Les mots : « c'est quelque chose de plus divin » ne nous indiquent pas la nature de sa démarche. Mais l'avant-dernière pensée du livre VIII est peut-être plus explicite : Les mots aTpéçr)Tai et Xoit' Eùou (« tourne » et « tout droit ») y semblent indiquer une combinaison de mouvements. N'est-ce pas le procédé même du «feu artiste» ou « raison universelle», qui tourne autour du monde et « se répond partout »? (infra VIII, 54 et 57.)]

VI, 36 — page f23, ligne U. Annoncer, aux mots « par conséquence », une note, qui serait ainsi conçue:

1 bis. [Sur l'opposition de ces deux hypothèses, cf. m/ra VII, 75, et la note, rectifiée aux Addenda.}