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LA COMTESSE HÉLÈNE POTOCKA.

elle eût consenti au mensonge qu’on lui demandait.

Hélène n’avait point oublié les bontés dont les duchesses de Gramont et du Châtelet l’avaient comblée dans son enfance ; c’est encore madame de Choiseul qui lui dit l’héroïque attitude de madame de Gramont, sa tante, devant le terrible tribunal. La duchesse ne songea pas un instant à se défendre ; elle ne s’occupa que de madame du Châtelet à laquelle elle avait donné le funeste conseil de rentrer en France, elle répondit à ses juges : « Je ne veux pas me défendre. Je ne cherche point d’excuse, mais cet ange qui est auprès de moi n’a pris aucune part aux affaires politiques, sa vie et son caractère suffisent à la justifier, condamnez-moi et laissez la vivre. — N’as-tu pas envoyé de l’argent aux émigrés ? demanda un des juges. — Je pourrais dire non, répondit-elle avec fierté, mais ma vie ne vaut pas un mensonge ! » Les deux amies montèrent sur l’échafaud le même jour[1].

La jeune duchesse de Choiseul elle-même avait

  1. Le duc du Châtelet commandait en chef les gardes françaises. On lui reprocha d’avoir trop relâché la discipline au moment de la Révolution. Il était fils de la célèbre Émilie, marquise du Châtelet, amie de Voltaire. Il fut décapité le 14 décembre 1793