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LA COMTESSE HÉLÈNE POTOCKA.

mes lettres plus froides. Ah ! mon cher Vincent, serait-ce ton cœur qui ne te ferait plus trouver le même plaisir à lire mes lettres ? Lequel des deux est changé ? Tout ce que je sais, c’est que jamais je ne t’ai aimé avec plus d’ardeur que je t’aime. Rien au monde ne m’occupe que toi, il me semble que tout m’est indifférent dans le monde hors toi et ce qui te concerne. J’ai cru que cela s’appelait aimer !

» Ah ! La Fontaine avait bien raison de dire :


Amants, voulez-vous voyager ?
Que ce soit aux rives prochaines.


» Dès qu’on se quitte, on a mille choses à craindre, on se fait des fantômes d’un rien, on est triste, on a de l’humeur, cela vous rend injuste, l’aigreur peut s’en mêler et l’amour, qui raccommode les amants qui sont ensemble, n’a pas le même pouvoir dans l’éloignement. Ah ! reviens, mon cher Vincent, car je ne peux plus vivre sans toi, je suis bien triste, le mauvais succès de mes affaires te dégoûtera, l’ennuiera, et j’ai peur que cela ne s’étende à moi.

» Tu ne te fais pas d’idée de la beauté de l’île ; elle est touffue : les lilas, les rosiers, les chèvrefeuilles sont plus hauts que moi. L’acacia est un