Page:Pergaud - La Guerre des boutons, 1912.djvu/148

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
148
la guerre des boutons


a cru que c’était elle qui lui avait refait sa pièce et il lui a passé quéque chose comme engueulade.

– Ça, c’est vraiment un bon truc, convint Boulot, qu’en dis-tu, Bati ?

– Je dis, moi, que ça ne me servira à rien du tout le truc à Lebrac, passe que mon père ne se saoule jamais.

– Jamais ! s’exclama en chœur toute la bande étonnée.

– Jamais ! reprit Bati, d’un air navré.

– Ça, fit Lebrac, c’est un malheur, mon vieux ! oui, un grand malheur ! un vrai malheur ! et on n’y peut rien.

– Alors ?

– Alors t’as qu’à rogner quand t’iras en commission. Je « m’esplique » : quand tu as une pièce à changer, tu cales un sou et tu dis que tu l’as perdu. Ça te coûtera une gifle ou deux, mais on n’a rien pour rien en ce bas monde, et puis on gueule avant que les vieux ne tapent, on gueule tant qu’on peut et ils n’osent pas taper si fort ; quand c’est pas une pièce, par exemple quand c’est de la chicorée que tu vas acheter, il y a des paquets à quatre sous et à cinq sous, eh bien si t’as cinq sous tu prends un paquet de quatre sous et tu dis que ça a augmenté ; si on t’envoie acheter pour deux sous de moutarde, tu n’en prends que pour un rond et tu racontes qu’on ne t’a donné que ça. Mon vieux, on ne ris-