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la guerre des boutons


Camus regarda le Gros Buisson et plus particulièrement son chêne pour être fixé sur la hauteur approximative du poste de Touegueule, puis il examina soigneusement les éraflures des branches afin de découvrir les points où l’autre posait les pieds. Ensuite, par cette sorte d’escalier naturel, de sente aérienne, il grimpa. Tel un Sioux ou un Delaware relevant une piste de Visage Pâle, il explora de bas en haut tous les rameaux de l’arbre et dépassa même en hauteur l’altitude du poste de l’ennemi, afin de distinguer les branches foulées par le soulier de Touegueule de celles où il ne se posait pas. Puis il détermina exactement le point de la fourche d’où le frondeur lançait sur l’armée de Longeverne ses cailloux meurtriers, s’installa commodément à côté, regarda en dessous pour bien juger de la culbute qu’il méditait de faire prendre à son ennemi et tira enfin son eustache de sa poche.

C’était un couteau double, comme les muscles de Tartarin ; du moins l’appelait-on ainsi parce qu’à côté de la lame il y avait une petite scie à grosses dents, peu coupante et aussi incommode que possible.

Avec cet outil rudimentaire, Camus, qui ne doutait de rien, se mit en devoir de trancher, à un fil près, une branche vivante et dure de foyard, grosse au moins comme sa cuisse. Dur travail et qui de-