Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 1.djvu/105

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
87
SUR VILLE-HARDOUIN


À peine couronné, l’Empereur apprit qu’une nouvelle inondation des Bulgares menaçoit Andrinople, qu’ils enlevoient et emmenoient en esclavage toute la population des campagnes. Aussitôt il vole au secours de ses sujets, harcèle les ennemis, et, par une combinaison savante, parvient à délivrer une multitude innombrable de prisonniers que Jean faisoit filer sur les derrières de son armée. Ce premier succès montra que, si Henri l’emportoit sur Baudouin dans l’art de gouverner, il ne lui cédoit pas en valeur.

Henri, depuis qu’il avoit pris les rênes du gouvernement, s’étoit étudié à effacer tous les ombrages qui pouvoient encore exister entre sa famille et celle de Montferrat. Se trouvant en parfaite intelligence avec ce prince, il lui avoit demandé en mariage Agnès sa fille, dans l’espoir que cette union resserreroit leurs liens. Cette jeune princesse, que son père avoit depuis peu fait venir de Lombardie, fut envoyée à Constantinople. Ville-Hardouin, chargé par l’Empereur d’aller la recevoir dans la ville d’Abydos où elle débarqua, eut l’honneur de la présenter à son futur époux, et les noces eurent lieu presque immédiatement.

À la même époque, Théodore Lascaris, qui possédoit presque toute la partie de l’Empire située au-delà du détroit, et qui s’étoit affermi, tant par ses succès que par de grandes qualités politiques, se fit couronner solennellement à Nicée comme empereur d’Orient. C’étoit le rival le plus dangereux de l’empereur Henri ; et sa puissance étoit d’autant plus à redouter, que non-seulement il étoit sur de la fidélité de ses sujets, mais qu’il entretenoit de secrètes intelligences