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[1205] de la conqueste

passa cette nuit jusqu’au jeudy matin des feries de Pasques, qu’aprés avoir oüy messe, et pris leurs repas, les Comains vinrent derechef attaquer le camp, et donnérent jusques aux tentes et pavillons. Le cry s’estant levé chacun courut aux armes, et toutes les batailles sortirent hors des barriéres dans l’ordre qui avoit esté prescrit.

189. Le comte de Blois fut le premier de tous qui s’avança avec sa trouppe : et commença à charger les Comains, mandant à l’empereur Baudoüin de le suivre pour le soûténir. Mais hélas ! qu’ils observérent mal ce qu’ils avoient arresté le soir précédent ; car ils poursuivirent à toute bride les ennemis, les menans battans prés de deux lieuës loing, jusqu’à ce que les autres, voyans leur avantage, tournérent bride tout à coup, crians et tirans sur les nostres ; lesquels, comme ils n’estoient pas tous également expérimentez au faict des armes, commencérent à prendre l’épouvante et à se deffaire d’eux-mesmes. Le comte de Blois, qui avoit esté des premiers au combat, ayant esté griévement blessé en deux endroits, et porté par terre, l’un de ses chevaliers nommé Jean de Friaise, descendit à l’instant de son cheval, et le remonta dessus. Plusieurs de ses gens luy ayans voulu persuader de se retirer à cause de ses blessures, il leur fit cette response genereuse : A Dieu ne plaise que jamais il me soit reproché que j’aye fuy du combat, ny que j’aye abandonné l’Empereur !

190. D’autre part l’Empereur, qui se trouvoit pressé par les ennemis, tâchoit de rallier ses gens, en leur protestant que quant à luy il n’estoit pas resolu de fuir, les conjurant de ne l’abandonner en une neces-