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prendre aucune chose d’eglise. Les peuples, curieux de voir chose nouvelle, y alloient de toutes parts, et aussi bien les catholiques que les protestans, les uns seulement pour voir les façons de cette nouvelle doctrine, les autres pour l’apprendre, et quelques autres pour cognoistre et remarquer ceux qui estoient protestans.

Ils preschoient en françois, sans alléguer aucun latin, et peu souvent les textes de l’Évangile, et commençoient ordinairement leurs sermons contre les abus de l’Église, qu’aucun catholique prudent ne voudroit deffendre. Mais de là ils entroient pour la pluspart en invectives, et à la fin de leurs presches faisoient des prières, et chantoient des pseaumes en rythme françoise, avec la musique et quantité de bonnes voix, dont plusieurs demeuroient bien édifiez, comme désireux de chose nouvelle, de sorte que le nombre croissoit tous les jours. Là aussi se parloit de corriger les abus, et d’une reformation, de faire des aumosnes et choses semblables, belles en l’extérieur, qui occasionnèrent plusieurs catholiques de se ranger à ce party ; et est croyable que si les ministres eussent esté plus graves et plus doctes, et de meilleure vie pour la pluspart, ils eussent eu encore plus de suite. Mais voulurent du premier coup blasmer toutes les cérémonies de l’Église romaine, et administrer les sacremens à leur mode, sans garder la modestie qu’observent encore aujourd’huy plusieurs protestans, comme ceux d’Allemagne et d’Angleterre, qui ont encore leurs evesques, primats et leurs ministres, qui ont pris et retiennent le nom de curez, diacres et soubs-diacres, chanoines, doyens, et portent les surplis et ornemens de l’Eglise