Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 33.djvu/159

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impossible de les appaiser, prit aussi son habit episcopal, et se présenta à eux, leur faisant des remonstrances, ausquelles, et à la dignité de leur evesque, rêvestu en cette sorte, cédèrent leurs querelles, et chacun se retira en maison.

Or il est certain qu’Alexandre le Grand, duquel l’ambition surpassoit les cieux, pour conquester d’autres mondes, n’eust pas ployé les genoux devant le pontife, ny la fureur d’Attila, qui fut estimé le plus cruel et barbare capitaine de son aage, ny la rage et cruauté d’un peuple acharné de son propre sang et de sa patrie, n’eussent pas si-tost esté appaisez, si ces pontifes eussent esté rêvestus d’habillemens communs, comme les ministres de France. Lesquels, combien que par belle apparence ils disent et preschent qu’il faut oster et corriger les abus, et, comme le bon et diligent jardinier, emonder les arbres de chenilles et de branches mortes, et en couper quelquefois de vives pour avoir plus de fruict et de bois, si est-ce pourtant qu’il ne faut pas couper l’arbre par le pied, et n’y laisser que la racine : ainsi ne faut-il pas, pour amender les abus que ces réformez disoient estre en l’Eglise, en retrancher tout à fait la saincteté, l’ornement et les cérémonies, et s’attacher à la malveillance des habits, pour en abattre l’honneur et le service, et la renverser entièrement.

Aussi est-il impossible que le menu peuple, de longtemps contenu dans l’obeïssance par sa loy et coustume, élève son esprit plus haut que sa portée ; à l’infirmité duquel nos pères se sont très-sagement accommodez, les contenans avec l’usage de ces solemnitez extérieures en la crainte de Dieu, et obeissance de leurs princes supérieurs ; et estant loisible, voire neces-