Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 33.djvu/272

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ses desseins, qui seroient de subjuguer le pays de Normandie, et en bailler une bonne partie aux Anglois, anciens ennemis de la couronne de France, et qui ont tousjours cherché de faire leur profit de nos divisions, dont il n’est besoin d’alléguer les exemples connus à un chacun ; et est bien croyable que la nécessité d’argent dans laquelle est réduit l’Admiral pour payer son armée et ses reistres, avec la passion de sa cause, luy fera oublier le devoir de sujet envers son roy et sa patrie ; et en l’opinion et au jugement de vous autres, très-sages et bons capitaines qui estes icy assemblez, je recognois bien que vous voulez du tout, comme très-obeissans, vous conformer au commandement du Roy et advis très-prudent du mareschal de Brissac, le plus sage et expérimenté capitaine de France après le Connestable ; et, de ma part, je craindrois toujours de faillir en mon opinion, mesmement pour contredire à tant de sages capitaines et au commandement du Roy ; mais j’ai aussi souvent ouy dire et appris par expérience que sur nouveau accident il faut prendre nouveau remède. Chose qui me fera plus librement dire ce qui me semble en cette affaire, sans me laisser emporter d’aucune affection particulière. Premièrement je trouve qu’en apparence le conseil de M. le mareschal de Brissac est fort bon, de vouloir persuader au Roy que Sa Majesté envoye son armée pour défaire celle de l’Admiral, remettre la Normandie en liberté, et en chasser les Anglois le plustost qu’il sera possible, et garder qu’ils ne prennent plus de pied et ne donnent plus d’aide et d’argent aux huguenots, et confesse que leur conservation ou leur ruine dépend de l’Admiral et de son armée. Mais de partir si soudain pour le