Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 4.djvu/205

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
200
ANCIENS MÉMOIRES

devoient tout attendre de leur courage et de leur seule adresse, sans espérer aucun secours qui pût tourner au desavantage de l’un ny l’autre. Le gouverneur parut satisfait de ses raisons ; mais il ne sortit pas de la crainte qu’il avoit qu’on ne luy fît quelque supercherie.

Le lendemain Bertrand s’arma le plus lestement qu’il luy fut possible et refusa de prendre une cuirasse, pour combattre avec plus de liberté, se contentant d’un casque, d’une lance et d’un bouclier. Il se rendit, dans cet équipage, à l’église la plus prochaine, pour entendre la messe avant son départ, et recommander à Dieu la justice de sa cause et la conservation de sa vie, le priant, de toute l’étenduë de son cœur, de bénir la droiture de ses intentions, et de donner un heureux succès à ses armes. Il voulut même aller à l’offrande pour y faire une espèce de vœu, dans lequel il se consacra tout entier à la défense de la religion chrétienne contre les payens et les infidelles, si le ciel luy faisoit remporter l’avantage avec lequel il esperoit sortir de ce combat. Après qu’il se fut aquité de ce devoir de pieté, son premier soin fut de prendre une soupe au vin, pour avoir plus de force dans l’action qu’il alloit faire ; et comme il se disposoit à monter à cheval, sa tante le vint arréter par le bras et s’efforça, par ses larmes et par ses soupirs, de le détourner de cette entreprise, luy représentant qu’il alloit combattre contre le plus redoutable chevalier de toute l’Angleterre, et qu’elle avoit toutes les raisons du monde d’appréhender que sa vie ne fût dans un extrême danger, ou du moins qu’on ne lui joüât quelque mauvais tour. Mais Bertrand ne se laissa point intimider