Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 4.djvu/237

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
232
ANCIENS MÉMOIRES

dame, par ce mariage, entrant encore davantage dans tout ce qui toûchoit Guesclin, son époux, le pria d’être un peu plus credule aux avis qu’elle luy donnoit sur les jours dont l’étoile étoit heureuse ou malheureuse, l’assurant qu’il sortiroit toûjours avec gloire de toutes les occasions les plus dangereuses, s’il observoit regulierement de ne se jamais commettre dans les jours qui renfermoient en eux quelque fatalité. Bertrand traita de vision tout ce qu’elle luy disoit ; mais il remarqua depuis que les avis de sa femme n’étoient point à mépriser, quand il fut pris à la journée d’Auray ; car ce fut justement dans un jour qu’elle avoit mis au rang de ceux qui luy devoient être malheureux. Mais il faut croire que le ciel permet que ces disgraces nous arrivent, pour punir la crédulité superstitieuse que nous avons pour ces sortes de prédictions, parce que ces jours pretendus heureux ou funestes n’ont aucune connexion naturelle avec la liberté de l’homme, et si l’on mettoit sur son compte tout ce qui n’est point arrivé de fâcheux dans ces jours, on decouvriroit que quand les prédictions sont suivies de leurs evenemens, c’est un pur effet du hasard, qui pourtant fait une si grande impression sur nos esprits, que nous n’en pouvons revenir, quand une fois nous avons veu quelque chose arriver sur les principes de l’astrologie judiciaire, dont cette dame se piquoit.

Durant les trêves qui s’étoient faites entre Charles de Blois et Jean de Monfort, Bertrand ne pouvant demeurer oisif, se rendit auprès de Charles, duc de Normandie, pour luy faire offre de son bras et de son épée, contre une foule d’Anglois et de Navarrois qui ravageoient le royaume de France et s’emparoient de