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ANCIENS MÉMOIRES

tagne ; et que, quand on les tiendroit dans la vallée, l’on rebrousseroit aussitôt chemin, pour les venir charger de front en flanc, et par derrière. La chose fut ponctuellement exécutée comme Bertrand l’avoit projettée. Il donna l’ordre qu’on chargeât tous les équipages sur leurs mulets, et qu’on les fit marcher devant, afin que la gendarmerie, qui les suivoit, les pût tout à fait couvrir.

Quand les Anglois aperçurent de dessus leur montagne cette démarche des François, ils la prirent plutôt pour une fuite que pour une retraite. Ils en allèrent aussitôt donner avis au captal, qui, voyant aussi ce mouvement, ne pouvoit se tenir de joye, croyant que Bertrand n’avoit point d’autre dessein que celui de se tirer d’affaire, et du mauvais pas dans lequel il s’étoit embarqué. Mais Pierre de Squanville, qui connoissoit le caractère de Bertrand, essaya de le détromper de l’opinion dont il paroissoit prevenu, luy disant qu’il étoit à craindre que la contenance de Bertrand ne fût une feinte et un stratagême, pour retourner sur ses pas contre eux, et qu’on avoit beaucoup manqué quand on avoit quité la montagne, où l’on étoit si bien posté. Le chevalier Bambroc enchérit encore sur ce qu’avoit dit Pierre de Squanville, et fit toutes les instances imaginables pour engager le captal de Bue à reprendre le chemin de la montagne ; mais Jean Joüel leur reprochant leur crainte, jura qu’ils feroient mieux de quiter l’armée que d’y jetter l’alarme de la sorte. Il ajoûta que Bertrand n’étoit point un homme si fort à redouter ; que s’il s’étoit jusqu’alors signalé dans la guerre, il ne s’ensuivoit pas qu’il fût également heureux par tout ; que les armes étoient journalieres, que