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SUR DU GUESCLIN.

bien que cette place étoit aux abois. Il y eut un arbalêtrier qui le rassura, prenant la liberté de luy dire que s’il le trouvoit à propos il se serviroit d’un stratagême qu’il avoit medité pour encourager les assiegez à ne se pas encore rendre sitôt. Il luy représenta qu’il attacheroit un billet au dard qu’il lanceroit de son arbalête, et qu’il tireroit si juste en se postant dans un lieu qu’il sçavoit, qu’il feroit tomber le papier dans la tour, dont la lecture avertiroit le gouverneur qu’il tint encore bon pendant quelque temps, parce qu’il seroit secouru dans peu.

Ce prince goûta fort la pensée de cet arbalêtrier ; il luy donna l’ordre d’en venir au plûtôt à l’exécution. Cet homme darda son coup avec tant de justesse et de force, que le billet tomba dans la tour tout auprès de ce signal de feu que les assiegez avoient allumé. Il fut mis entre les mains du gouverneur, qui sur l’heure assemblant ses gens, leur exposa ce que contenoit ce papier, et que Charles de Blois leur mandoit que dans le jour de Saint Michel prochain, qui devoit arriver bientôt, ils seroient secourus ; qu’ils eussent donc à ne point precipiter avant ce temps la reddition de la place, et que s’ils n’avoient point de ses nouvelles dans ce jour prefix, ils pouroient alors faire leur condition la meilleure qu’ils pouroient avec leurs ennemis.

Cette bonne nouvelle donna quelque esperance aux assiegez : mais comme ils n’avoient pas assez de vivres pour se soutenir jusqu’à la Saint Michel, il y eut un chevalier de la garnison qui s’avisa de leur dire, que pour ne pas succomber à la faim qui les consumoit, il étoit à propos d’envoyer au comte de Monfort, et