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ANCIENS MÉMOIRES

pour grossir leur armée qui étoit aux champs. Hugues de Caurelay, pour amuser Bertrand, cependant qu’il feroit de son côté touttes les diligences nécessaires pour amasser tout ce secours et ce renfort, envoya l’un de ses gardes à Vire, avec ses dépêches pour demander bataille à Bertrand, et convenir avec luy d’un jour pour cet effet. Le garde arriva bientôt devant cette place, qu’il vit environnée d’enseignes, de tentes et de hutes touttes couvertes de feüillées. Tout y retentissoit du bruit des trompettes, et le camp luy paroissoit remply de tant de soldats, qu’il ne croyoit pas que les Anglois fussent en assez grand nombre pour mesurer leurs forces avec celles des François.

Tandis que ce cavalier avançoit chemin, il apperçut un autre trompette qui portoit les armes de Guesclin sur sa casaque, et qui revenoit du Mans, où son maître l’avoit envoyé. Celuy-cy voyant que l’Anglois avoit aussi sur sa cotte d’armes celles de Thomas Granson, general des ennemis, la curiosité luy fit naître l’envie de l’approcher pour sçavoir quel étoit le motif qui l’amenoit en ces quartiers. L’autre luy répondit qu’il luy donnoit à deviner quel étoit le sujet de son message. « c’est apparemment pour demander bataille, luy dit le garde de Guesclin, comptez que vous l’aurez ; » ajoûtant dans son patois : Car je connois Monseigneur a tel qu’il ne vous en faudra, ne que mars en carême. Ces deux hommes s’étans ainsi joints, continuerent leur route devisans toûjours ensemble sur la valeur et le courage de leurs maîtres. Ils arriverent enfin jusqu’à Vire, dont on leur ouvrit le château pour les faire parler à Bertrand, qu’ils trouverent se promenant dans la cour de ce lieu, s’entretenant avec