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de se retirer à Conflans jusqu’au retour de M. le comte, après lequel nous parachèverons l’histoire de la disgrâce du duc de Sully.

Cependant, avant que clore cette année, je ne puis que je ne rapporte qu’elle produisit en Espagne le plus hardi et le plus barbare conseil dont l’histoire de tous les siècles précédens fasse mention ; ce qui donna occasion à la France de rendre un témoignage de son humanité et de sa piété tout ensemble.

L’Espagne étoit remplie de Morisques, qui étoient ainsi appelés parce que de père en fils ils descendoient des Maures, qui l’avoient autrefois subjuguée et commandée sept cents ans durant.

Le mauvais traitement qu’ils recevoient du Roi, et le mépris qu’ils souffroient des vieux chrétiens, firent que la plus grande part d’entre eux conservèrent secrètement l’impiété et fausse religion de leurs ancêtres contre Dieu, pour la haine particulière qu’ils avoient contre les hommes.

Étant traités comme esclaves, ils cherchèrent les moyens de se mettre en liberté ; le soupçon qu’on en a, fait qu’on leur ôte toutes leurs armes, et particulièrement aux royaumes de Grenade et de Valence, où tout le peuple étoit presque infecté de ce venin ; il ne leur étoit même pas permis de porter de couteaux s’ils n’étoient épointés.

Le conseil d’Espagne, considérant que le feu Roi s’engageoit en une grande entreprise contre eux, eut en même temps appréhension que ces peuples prissent cette occasion d’allumer une guerre civile dans le cœur de leur État. Pour prévenir ce dessein, qui n’étoit pas sans fondement, le roi Catholique fit, au