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leur portoit n’étoit fondée que sur son service, qu’il estimoit que le côté des princes étoit le parti le plus légitime. Il s’emportoit jusqu’à tel point que de dire à la personne de la Reine qu’elle étoit ingrate et légère.

On redisoit tout cela à la Reine, ce qui ne l’offensoit pas peu contre lui ; et, entre autres choses, on lui représentoit qu’il vouloit établir M. de Bouillon huguenot, ce qui ne pouvoit être qu’au préjudice du service du Roi.

Ce temps étoit si misérable, que ceux-là étoient les plus habiles parmi les grands qui étoient les plus industrieux à faire des brouilleries ; et les brouilleries étoient telles, et y avoit si peu de sûreté en l’établissement des choses, que les ministres étoient plus occupés aux moyens nécessaires pour leur conservation, qu’à ceux qui étoient nécessaires pour l’État.

Le duc de Bouillon, voyant que le marquis d’Ancre ne pouvoit faire réussir pas une de leurs demandes, s’avisa d’une ruse digne de son esprit. Il envoya prier le sieur de Bullion de le voir, et lui dit qu’il le vouloit avertir, comme ami de messieurs les ministres d’État, que la Reine étoit résolue de gratifier M. le prince de Péronne, mais qu’elle seroit bien aise d’avoir leur approbation ; ce dont il les avertissoit afin qu’étant sages mondains comme ils étoient, ils allassent au-devant de ses désirs.

La Reine, étant avertie de ce discours, s’aperçut incontinent que les princes vouloient profiter de la division qu’ils croyoient être entre elle et ses ministres ; elle avoua, en cette occasion, au sieur de Bullion qu’il étoit vrai qu’elle avoit eu beaucoup de